Des licornes et de la barbe à papa
- Maude Desbois
- 4 juin 2023
- 3 min de lecture
Par Maude Desbois
Pendant que les forêts brûlent dans plus de 120 lieux au Québec, notre premier ministre annonce fièrement l’investissement de nos gouvernements au montant de 300 millions de dollars (ce n’est que la pointe de l’iceberg) dans le projet « Vallée de la transition énergétique ». Un immense Hummer lui vole la vedette et soulève l’indignation et la stupeur (c’est peu dire!). Très représentatif de ce que nous imaginons comme futur pour nos enfants. Des villes désertes où trôneront des armées de gros véhicules électriques.
L’utopie, c’est de continuer à vivre et à agir comme nous le faisons, en imaginant que la fin sera belle.
La tête dans la ouate, on se fait sucrer notre avenir et couper les ailes pendant que nos gouvernements prennent leurs décisions à travers la lunette de l’expansion éternelle, dans une vision à court terme. En employant un lexique qui nous déconnecte toujours plus du vrai, il est simple de nous faire croire que nous prenons soin de la Terre dont nous sommes locataires en tenant d’une main notre tasse réutilisable, et de l’autre le volant du dernier modèle de VUS (ou de Hummer électrique!), arborant un t-shirt dernier cri en coton bio-équitable fabriqué au Bangladesh. Nous nous retrouvons alors à la fois victimes et créateurs d’un écoblanchiment collectif pour nous donner bonne conscience. Imposteurs dans notre propre communauté. Notre société est fatiguée sous tous les angles et nous tentons de faire au mieux, chacun·e à notre façon, et dans la mesure de nos capacités socio-économiques pour lutter et tenter d’imaginer une Terre que nous n’aurons pas essoufflée et poussée à bout de ressources.
Nous ne pouvons plus accepter en tant qu’être vivants - tentons ici de revenir à la base de ce que nous sommes, sans ego ni hiérarchie - que nos gouvernements continuent cette dérape qui nous mène droit au désastre.
Nous avons depuis longtemps crié : l’empereur est nu! Et pourtant, vous persistez dans votre imaginaire collectif de politiciens à courir vers le mur à toute allure, nous entraînant tous·tes dans votre convoi.
Les feux généralisés dans la province alors que la période de sécheresse habituelle n’est même pas encore là ;
Les inondations multipliées sans que des mesures concrètes et efficaces soient déployées rapidement ;
La contamination des écosystèmes et de l’humain, décuplée et dévoilée sur laquelle, vous fermez les yeux ;
Les coupes forestières faites au vu et au su de tous·tes, dans des forêts anciennes en voie d’être protégées (pourquoi ne le sont-elles pas déjà d’ailleurs?) ;
La convoitise des dernières grandes rivières du Québec pour y construire plus de barrages hydro-électriques (ne devaient-elles pas elles aussi être protégées?) ;
L'extinction des caribous, pour ne nommer que les espèces qui font les manchettes et pour qui les actions irraisonnées de notre gouvernement sont maintenant qualifiées de “stratégie d’extinction” ;
Les lacs Bloom de ce monde que l’on prend pour des dépotoirs et des dévidoirs ;
L’insécurité alimentaire sans cesse grandissante ;
Les pesticides en hausse dans nos champs, nos cours d’eau et nos aliments ;
La justice environnementale oubliée ;
L’iniquité accrue et persistante ;
Une liste exhaustive prendrait assurément toute la place.
Dur à dire maintenant qui vit à dos de licorne, brandissant une barbe à papa de grande fête foraine, engloutissant notre futur qui fond comme du sucre sur la langue de bois de nos porteurs de ballons.
« Continuons » scande la campagne de François Legault. Deux mandats à l’affirmer avec l’assurance aveugle de celui qui ne redescend pas sur Terre.
Continuons quoi?
De détruire les écosystèmes?
De donner toute la place aux pétrolières?
De creuser à mains nues le fossé des classes sociales et des injustices?
De nourrir nos enfants d’arsenic, de nickel et de pesticides au profit des multinationales?
De développer « durablement » notre soif de pouvoirs et de croissances insatiables?
De mourir à grands feux, à petits coups de sécheresses ou noyés par notre propre aveuglement?
Fermez les yeux! Il est moins effrayant de regarder ailleurs que de s’imaginer que l’immuable paquebot de notre semblant de démocratie puisse un jour lever l’ancre et voguer vers des rives où la planète et les êtres vivants seraient considérés véritablement. N’oublions pas que tout a un prix, que tout laisse une trace, qu’on ne peut prendre sans y laisser quelque chose.
Il est tellement, absolument, invariablement légitime d’exiger un gouvernement engagé pour l’avenir de nos enfants, qui respecte les écosystèmes et tout ce qui vit; qui pourra nous regarder dans les yeux et nous dire avec confiance qu’il a fait les bons choix.
Oserez-vous regarder nos enfants dans les yeux, dormir tranquilles ce soir avec la conviction d’avoir tout mis en œuvre pour le bien commun?
Je vous pose cette simple question aujourd’hui et je vous la répéterai jusqu’à ce que la réponse soit : oui!
Merci beaucoup Maude d'extérioriser ce que tant de personnes pensent tout bas ou même d'offrir une mise à jour ou un aide mémoire que le combat entre notre cupidité et la bonne volonté n'est pas terminé et commence par le fait de s'engager dans des actions concrètes et de dénoncer l'inaction.